Hier, alors que Simone rejoignait le Panthéon afin que son âme plane au dessus de nous tous pour des milliers d'années, ma fille a demandé qui était Simone Veil. Elle avait oublié qu'on en avait parlé l'an dernier quand Simone nous quittait, nous laissant tous orphelins et orphelines.
J'ai à nouveau expliqué Simone Veil, née Jacob, enfant persécutée et déportée parce que juive. Fille d'une mère et d'un père qui ne reviendront pas, soeur d'un frère qui lui non plus ne reviendra pas.
J'ai expliqué le numéro sur son bras, la force de cette femme sublime, son amour fou pour Antoine son époux et sa vie de mère aussi.
Et puis sa vie de combattante, sa hargne, ses discours, sa force, son regard haut mais jamais méprisant, ses lèvres charnues dont s'écoulaient des vérités, ses cheveux relevés en chignon, ses mains féminines et puissantes à la fois, sa soeur partie trop tôt, ses enfants aimés, ses petits-enfants adorés.
Et puis cette loi qui restera connue sous le nom « Loi Veil ». Cette loi qui a rendu aux femmes la liberté qu'on leur avait ôtée depuis toujours. La liberté de choisir de devenir mère ou non, de poursuivre ou non une grossesse non désirée,de ne plus se faire enfoncer une aiguille à tricoter sur la table d'une cuisine clandestine pour parfois y laisser sa vie, de ne plus n'être qu'un ventre, de DECIDER.
Depuis elle, depuis cette loi, en france des millions de femmes ont pu sauver leurs vies et avoir cette chance inouïe d'avoir le choix. Alors, comme elle le disait, « aucune femme ne recourt de gaieté de coeur à l'avortement. C'est toujours un drame et cela restera toujours un drame » mais cela sera un moindre drame que de porter un bébé non voulu.
Il n'y a pas de honte à avorter. Il n'y a jamais de joie et de plaisir à le faire.
C'est cela que je veux dire à ma fille, à mes fils aussi car l'avortement est une histoire de femmes mais j'espère d'hommes aussi.
Hier ma fille m'a demandé si moi j'avais déjà avorté. J'ai dit la vérité, j'ai dit que oui. Je pense qu'il faut dire à nos enfants qu'on peut avorter parce que c'était pas le moment, pas le bon partenaire, pas du tout voulu et tu sais quoi, malgré cela on reste des femmes dignes, des mères, des épouses, des maitresses.
Merci Simone.